Différences entre l’équipe médicale et la Doula

Attends, gynéco, sage-femme et maintenant doula, mais qui fait quoi ?!

Partout dans le monde, il y a deux familles de professionnels médicaux pour suivre un accouchement : sage-femme et gynécologue-obstétricien.ne. Malheureusement comme le témoignent ces professionnels eux-mêmes, le manque d’effectif et les contraintes du système hospitalier ne leur permettent pas de jouer le rôle de soutien émotionnel et physique qui est si nécessaire pour les parents.

Parce que le métier de doula est encore assez méconnue en France, il est important de clarifier notre positionnement, notre éthique, les bénéfices, bienfaits et limites de notre rôle.

Je soutiens avec force et passion le combat une femme = une sage-femme. C’est ABSOLUMENT PRIMORDIAL. Que pour chaque naissance dans ce pays et dans le monde, une sage-femme puisse accompagner la future mère de A à Z pendant sa grossesse, son accouchement et son post-natal.

Pour autant je crois profondément que le rôle d’une doula est différent et complémentaire de celui d’une sage-femme. La doula ne vise pas à remplacer la sage-femme.

A travers mon expérience en Australie, aux côtés des femmes qui accouchent et des sages-femmes qui travaillent, j’ai pu l’observer encore et encore. Notre rôle est aujourd’hui respecté, compris et meme apprecié ! Souvent la sage-femme de garde à l’hôpital m’a accueilli en salle de travail en commentant : ‘ah génial, vous avez une doula, cela va me faciliter le travail‘.

Et même lors d’accouchements à domicile, là où le rôle de la sage-femme libérale se rapproche le plus de l’idéal ‘une femme = une sage-femme‘ (voir 1 femme = 2 sages-femmes souvent !) notre rôle est tout de même utile, complémentaire et valable !

CE QUE JE NE FAIS PAS

  • je ne fais aucun geste médical (pas d’examens, pas de monitoring, … ) C’est le rôle du professionnel de santé.
  • Je ne donne pas de conseils médicaux, ni ne diagnostic une condition. C’est le rôle du professionnel de santé.
  • Je respecte le champ d’intervention de la profession de sage-femme et les articles L4151-1 L4161-3, L4161-1, L4161-5 du Code de la Santé Publique.
  • Je travaille toujours et uniquement en complément du suivi médical choisi. Je refuse d’accompagner une famille qui souhaite un accouchement non-accompagné médicalement ou accouchement non-assisté (ANA).

CE QUE JE FAIS

Je suis présente exclusivement pour l’unique cliente que je soutiens sur cette période, ce qui n’est pas possible pour le pro de santé qui suit plusieurs patientes en même temps.

J’offre une continuité d’accompagnement pendant le travail (si autorisé par l’équipe médicale). Je reste toute la durée de l’accouchement : que cela soit 4 heures ou 20 heures. Le pro de santé est souvent là pour un shift de 7 ou 8 heures et ensuite l’équipe change donc la famille sera suivie par différentes sage-femmes* au fur et à mesure du travail. L’obstétricien.ne n’intervient quent à lui qu’en cas de complications ou lors de la deuxième phase du travail : la naissance du bébé.

*sauf bien sur, en cas de suivi par une sage-femme libérale en plateau technique, en maison de naissance ou à domicile mais qui sont encore des options rares en France.

Je reste présente dans la salle d’accouchement pour les deux parents pendant tout l’accouchement (bon sauf pause pipi!) De part le nombre de patientes (souvent trois ou plus en même temps), le pro de santé rentre et sort de la chambre et ne peut offrir une continuité dans le processus, laissant le conjoint.e comme seul référent pour la femme.

Je consacre 100% de mon temps au soutien émotionnel et physique, à l’information et au plaidoyer. Quand il est dans la chambre le pro de santé fait en priorité du soin ‘médical’ : vérifie les équipements, monitoring, prend la tension, range et organise, documente le dossier médical sur l’ordi ou papier, organise les interventions et médicaments si nécessaire. Les études montrent qu’il ne lui reste que 12% de son temps pour ce soutien émotionnel et physique.

Je masse, j’encourage, je touche, je parle, j’observe, … tous mes gestes sont des gestes ‘d’amour’. Car il a parfois peu de temps, le pro de santé consacre souvent celui-ci aux gestes médicaux. Pour la mère ce toucher peut souvent être majoritairement désagréable : toucher vaginal, obligation de s’allonger pour le monitoring, aiguille pour l’intra-veineuse, la pose d’une sonde urinaire, la péridurale, l’épisiotomie, …

Je suis indépendante, je ne travaille pas pour l’hôpital. J’accompagne mes clients lorsqu’ils veulent prendre une décision informée et faire valoir leur Projet de Naissance. Tout acte médical nécessite le consentement libre et éclairé du patient. Le pro de santé est embauché par l’hôpital donc doit suivre ses régulations même si parfois il n’y est pas totalement favorable. Il est là pour prendre soin des patients avant tout mais doit aussi suivre ce qui lui est demandé par sa structure. Une position parfois difficile comme on pu le témoigner des amies sages-femmes !

EVIDENCE-BASED : Une étude américaine montre qu’ à l’hôpital, dans un suivi classique, une sages-femme passe 31% du temps dans la chambre d’une patiente et 69% hors de la chambre.

Trois études canadienne montrent que c’est 30 a 50% du temps dans la chambre d’une patiente et 50-70% de leur temps hors de la chambre.

En France, une sage-femme s’occupe en moyenne de 3 patientes par garde (et souvent plus). En suites de couches, une sage-femme peut prendre en charge jusqu’à 25 nouvelles mères.

NB : Il est important de rappeler que cet article n’est pas du tout une critique des professionnels de santé qui pratiquent leur métier dans des conditions très difficiles. Je critique un système. De nombreux professionnels se sentent démunis face à ce système rigide et rêvent de pratiquer leurs professions dans d’autres conditions. J’en ai rencontré beaucoup dont des amies qui sont véritablement en souffrance professionnelle et burn-out. Les pros de santé courent de patiente en patiente, communiquent avec les autres membres de l’équipe, couvrent les collègues pendant les pauses, gèrent le service, … ils sont en sous-effectif et travaillent avec beaucoup de stress.

Mais pour la famille, la réalité est là : on est un peu livré à soi-même!

Magnifique illustration du travail d’équipe lors d’un l’accouchement à domicile !! La doula qui aide debout avec le rebozo, la sage-femme accroupie qui accueille bébé , le conjoint qui soutient maman et la seconde sage-femme qui prend des notes ! (photo @alanna_farmer)